Jeanne était plantée sur la scène du théâtre et faisait les cent pas. Elle était tellement stressée à l'idée de revoir Lysandre qu'elle en avait mal au ventre. Elle l'avait embrassé la veille et n'en avait d'ailleurs pas dormi de la nuit. Elle y avait pensé sans arrêt et, après avoir occulté l'idée qu'elle s'était fichue la honte, elle n'arrêtait pas de se dire que c'était un premier baiser particulièrement bon et doux. En fait, on ne pouvait pas rêver mieux comme premier baiser, c'était sûr. Il y avait eu de la passion, de l'amour, de la tendresse dans ce baiser, et Jeanne ne pouvait pas le nier. Y en aurait-il d'autres ? Elle l'espérait tellement qu'elle s'en rendait presque malade.

Mais voilà, il fallait affronter Lysandre, et c'était là le véritable drame. Elle en avait le coeur qui battait à tout rompre. Il fallait qu'elle lui dise qu'elle était amoureuse de lui, qu'elle passait son temps à le repousser parce qu'elle craignait trop qu'il ne l'aime pas en retour... Il fallait vraiment qu'elle lui exprime l'ampleur de ses sentiments. Mais ça semblait tellement compliqué pour elle.

Elle se répétait ce qu'elle devrait lui dire si l'occasion se présentait... Mais ça lui semblait si... difficile. Jeanne craignait qu'il lui rigole au nez. Et puis elle espérait vraiment qu'Alix ne lui ferait pas faux bond. Mais c'était pareil, si elle ne venait pas ? Jeanne devrait-elle faire seule face au Lutra ?

Alors que son esprit retournait la question dans tous les sens, la porte du théâtre s'ouvrit lentement. Cette fois, elle en avait la certitude, son coeur avait raté un battement.

Après avoir épuisé une liste d'excuses longue comme le bras, Lysandre n'avait pas eu d'autres choix que de se rendre au rendez-vous prévu avec Jeanne le lendemain, même si la Cerva lui avait dit que ce n'était plus la peine d'y aller. Il ne pouvait pas l'éviter jusqu'à la fin de ses jours, même si cette solution était plutôt plaisante. Pour lui il ne faisait nul doute que Jeanne ne ressentait rien pour lui mais Alix n'en démordait pas et de toutes façons il avait raison, il fallait qu'il en ai le coeur net.

Arrivé devant la porte du Théâtre, il la poussa d'abord doucement pour regarder à l'intérieur. Jeanne se tenait sur le devant de la scène sous la lumière et semblait attendre. Il aurait bien pris le temps de la regarder encore parce qu'il la trouvait réellement jolie et qu'en plus elle ne le voyait pas, mais Alix le força à entrer dans la salle, visiblement agacée de l'attitude de son ami. 

Lysandre essaya d'avoir l'air décontracté mais dès qu'il se retrouva sous le regard de Jeanne, il eut envie de se rouler en boule dans un coin et d'attendre que la mort vienne le chercher. Il ne savait pas quoi lui dire ...

""Salut !"

Par exemple. Commençons par la base déjà.

"Heu, chuis venu avec Alix pour aider, enfin, je sais pas, enfin, peut-être. "

Alix s'était faite recruter par ses deux amis, chacun de leur côté, pour jouer le rôle de la chaperonne...enfin, en quelque sorte. La veille, Jeanne lui avait demandé de venir au rendez-vous fixé avec Lysandre pour travailler sur les décors, et celui-ci l'avait tout autant suppliée le matin même de ne pas le laisser affronter seul le regard de la faunette après leur échange salivaire. Tout en se disant que sa bonté finirait par la perdre, la Lutra avait accepté auprès des deux, ne voyant pas d'autre alternative pour qu'ils se revoient. Si elle avait dit non, c'était certain qu'ils se seraient évités tout le reste de l'année !

- Des pétards mouillés, de la patacitrouille...ah et n'oublie pas les baguettes en sucre !

Sur le chemin pour le théâtre, Alix faisait à son meilleur ami la liste de ce qu'elle estimait mériter en acceptant de tenir la chandelle. Lyly semblait persuadé que chandelle il n'y aurait pas, car Jeanne n'en avait soi-disant rien à faire de lui, mais Alix espérait de tout coeur que la Cerva lui démontrerait le contraire ce soir.
Devant la porte du sanctuaire des artistes, Alix fut contrainte de s'arrêter le temps que son comparse admirait la jolie hybride. Quelques secondes passèrent...

- Bon, t'as quel âge là ? Tu vas pas rester devant la porte à baver toute la soirée non plus !

Alix finit par pousser Lysandre vigoureusement dans le dos, afin de le faire entrer dans le théâtre. Au moins, comme ça, il ne pouvait plus échapper à son sort, et la jeune fille s'estimait heureuse qu'il n'ait pas fui en courant en approchant du lieu de rendez-vous.

- Salut Pep's ! Alors, ils sont où ces décors, qu'on s'y mette ?...Non non, laisse, je vais les chercher !

La Lutra avait profité que son amie hybride lui indiquait les coulisses pour y disparaître, laissant ainsi les deux gamins seuls alors qu'elle allait farfouiller très lentement dans l'espace qui servait à entreposer les décors à peindre. Curieuse comme pas deux, elle ne put résister malgré tout à la tentation de jeter un coup d'oeil à travers un rideau, pour voir s'ils allaient tous deux tenir les bonnes résolutions qu'ils avaient eu séparément face à la nouvelle entremetteuse de Beauxbâtons.

Si ça se trouve, le coeur de Jeanne allait exploser d'ici quelques secondes. Ou sa tête... Elle hésitait encore... Toujours est-il qu'une partie de son corps allait rapidement rendre l'âme tant elle était stressée.

Lorsque Lysandre et Alix pénétrèrent dans le théâtre, l'air totalement détaché de Lysandre la perturba. Alors il n'en avait rien eu à faire, c'est ça ? Si ça se trouve, il avait déjà oublié...? Et comment ça "il" était venu avec Alix ?! C'était elle qui lui avait demandé de venir, pas lui ! Alors pourquoi est-ce qu'il disait que c'était lui qui était venu avec elle ?! Si ça se trouve, il avait préféré lui demander aussi parce qu'il avait peur que Jeanne lui saute dessus comme une folle ?! TAIS TOI CERVEAU !!!

Oheuh... Oui... Oui d'accord... Les d'accord sont... Euuuuh ! Les décors sont dans les coulisses mais...

A peine eut-elle terminé sa phrase qu'Alix parti derrière la scène et là... Un silence de plomb s'installa entre Lysandre et Jeanne. Les poings serrés, le regard fixé à l'endroit où Alix avait disparu la dernière fois, Jeanne se décida alors à bouger et parla d'une voix beaucoup trop aigüe et forte pour être naturelle.

EUUUUUUH !!!!! Je vais aider Alix ! ALIIIIX ATTENDS MOIIII !!!!

Jeanne se rua alors dans les coulisses et, d'un air un peu nerveux, elle murmura.

Merci d'être venue... Mais ramènes tes fesses, je ne veux pas rester toute seule avec.. "lui" !!!

Jeanne tira alors avec l'aide d'Alix un grand décor de fond. Le plaçant au milieu de la scène, elle commença à se détendre. Si elle devait penser aux décors, son esprit se calmerait peut-être un peu...

Bon.... Voilà le décor du jardin... Je... Je l'ai dessiné, mais il reste à le peindre... Je... J'ai mis une petite lettre dans chaque partie pour le code couleur... Vous n'avez qu'à prendre les pots de peinture correspondant et peindre de la couleur indiquée... C'est un jeu d'enfant !

Elle se mit alors à rire nerveusement et attrapa un pinceau, manquant de trébucher au passage. En fait si, elle était extrêmement nerveuse.

Bon... On s'y met...?

Lysandre allait s'éclaircir la voix pour parler lorsque Jeanne couru rejoindre Alix dans les coulisses pour sortir un grand décor à peindre. Il frappa son visage du plat de sa main et soupira : si elle l'évitait autant que lui, ça n'allait pas être facile de discuter. Mais toujours égal à lui-même, le roi de la comédie reprit possession de ses moyens et s'empara d'un pinceau en écoutant les instructions de la Cerva.

"Ok Princesse ! Moi je commence par le jardin, côté cours. Enfin, tu vois, je me comprends, enfin bref, au boulot. Alix, prend les grandes surfaces ... C'est pas de la peinture à la bombabouse qu'on fait là, toute l'école va le regarder au spectacle de fin d'année ! Sans vouloir te mettre la pression bien sûr ..."

Il passa près de Jeanne pour aller s'occuper de sa partie et commença à peindre avec beaucoup d'application, en racontant une connerie dès qu'il le pouvait. Lui aussi était nerveux, autant que la faunette et même s'il n'en avait pas l'air, il guettait désespérément l'occasion de lui parler. Seulement, elle, elle avait l'air de tout faire pour que cette occasion ne se présente pas et cela mit à mal sa motivation.

"Bon, j'ai fini mon coin, vous en êtes où vous ?" dit-il en revenant vers les filles qui étaient toujours penchée sur leur partie du décor.

Alix avait malheureusement placé trop d'espoirs dans sa tentative de donner aux deux gamins un moment d'intimité propice à l'aveu de sentiments partagés. Elle s'éloigna du rideau alors que Jeanne la rejoignait en lui criant de l'attendre, et elle lui fit les gros yeux quand la faunette lui intima de les rejoindre.

- Non mais t'es chiante là. Comment tu veux que vous discutiez si je viens vraiment barbouiller avec vous ?

Malheureusement elle fut contrainte de revenir sur scène avec Jeanne et le décor que celle-ci avait choisi dans les coulisses.
Elle fit une grimace à son meilleur ami quand celui-ci insista sur le fait qu'elle devait s'appliquer. Non mais il était gonflé celui-là, déjà qu'elle était venue pour leur faire plaisir, en plus il la remerciait en la traitant de pas douée !

- Sympa ! Pour moi c'est "donne pas dans la bombabouse" tandis que pour elle tu donnes dans le surnom gentil. J'en connais une qui a le droit à un traitement de faveur.

Alix n'allait pas se priver de faire une allusion aussi peu subtile, étant donné qu'ils étaient sensé être là pour se parler. Bon, elle ne voulait pas y assister...mais si y avait besoin d'en arriver là, elle saurait s'éclipser dès que la discussion prendrait la tournure qu'elle espérait !

Lysandre s'était mis dans un coin pour peindre son morceau, tandis que les filles étaient à l'opposé, armées de leurs pinceaux et de pots bleus. Penchée sur son ouvrage, Alix ne frottait que paresseusement le carton et en profitait plutôt pour chuchoter des conseils à son amie.

- Allez, va lui parler. C'est le moment là, y a personne d'autre que nous et je ferai comme si je vous entends pas ! Regarde comme il se concentre rien que pour toi, c'est le seul à t'aider avec ces décors... Non ! Moi je compte pas, Je suis là parce que tu m'as suppliée !

Malheureusement, le Lutra revenait déjà voir l'avancement du travail de leur côté.

- Je crois que Picasso serait fier de moi ! répondit Alix en montrant son œuvre constituée de traits dans tous les sens. Au moins la couleur était bonne !

La jeune fille ne se demandait pas si ses compagnons connaissaient le peintre moldu, sachant qu'en général Lyly comprenait les références plus obscures pour les enfants issus de familles sorcières.
Bien qu'elle ait fraîchement acquis la place de conseillère conjugale auprès de ses deux amis, Alix ne passa pas à côté d'une occasion en or de faire le pitre : elle prit une mèche de ses cheveux et la trempa jusqu'à la moitié dans le pot de peinture bleue, puis l'en retira avec un grand sourire.

- Ah bah voilà, j'ai trouvé ma prochaine couleur ! Le vert commence à me lasser. fit-elle en admirant l'effet.

Jeanne pencha la tête légèrement sur le côté pour "contempler" l'oeuvre d'Alix. D'un air perplexe, elle était néanmoins très contente d'avoir préalablement tracé le dessin sur l'immense panneau. Alix y mettait de la volonté, c'était déjà ça ! S'amusant à gentiment charrier son amie, elle lui dit, tout en commençant à se détendre un peu.

Je ne sais pas qui est ton... Picasso, mais il ne doit pas être très doué en peinture, vu l'ampleur de ton talent !

Jeanne était une enfant issue d'une famille moitié hybride, moitié sorcier. Ses références ne se trouvaient donc pas du tout dans le monde des moldus. Monde qu'elle aurait aimé connaître, néanmoins !

Alix avait toujours l'art et la manière de détendre Jeanne qui commençait presque à oublier l'évènement qui s'était produit deux jours plus tôt, et c'était tant mieux. La voyant tremper ses cheveux dans la peinture, elle se mit à rire.

Ooooh, oui, cette couleur te va à ravir, c'est sûr ! Ca fait moins sévère que le vert ! Mais vous avez un problème avec la peinture tous les deux ! La dernière fois quand on a peint la fontaine, ça a...

En disant ça, elle s'était tournée vers Lysandre, comme si elle cherchait un regard approbateur de son côté. Mais elle fit comme surprise de tomber sur son regard qui la fixait. Son coeur rata encore un battement (ce qui allait finir par lui causer des problèmes cardiaques à ce train là...) et, dans un murmure à peine audible, elle termina sa phrase.

Mal... Fini...

Elle ne quittait pas Lysandre du regard, oubliant pendant un instant qu'Alix était là. Mais ce qui se passa ensuite sembla sorti de nulle part. Comme si son cerveau était parti en vacances et que sa bouche avait décidé de prendre le dessus.

Pardon, pour l'autre jour... Je... Je sais pas ce qui m'a pris. Je n'aurais pas du... Partir comme ça, c'était idiot...

Non mais c'était "elle" qui avait dit ça ?! Elle l'avait vraiment dit ??? Etait-ce le fait qu'elle était désormais plus à l'aise ?  En tous cas elle l'avait fait, ce fichu premier pas. Alix pouvait être fière d'elle !

Lysandre ne ménageait pas Alix mais celle-ci lui rendait bien et puis de toutes façons il n'oubliait pas qu'elle était là en premier lieu pour lui rendre service. Son allusion à Picasso le fît rire.

"Ouais, c'est Guernica ton truc !" dit-il en éclatant de rire.

"Mais ça vaut des milliers d'écus !"

Il finit son côté avant de revenir vers les filles et rit aussi quand Alix trempa ses cheveux dans la peinture.

"Attend, tu veux pas du rouge ? Je suis sûr que ça t'irait trop bien !"

Cela eut aussi le mérite de détendre Jeanne, qui revint malgré elle sur le terrain sur lequel elle avait glissé deux jours plus tôt. Lysandre la regarda, affable, sans faire aucun commentaire tandis que la petite Cerva semblait pétrifiée par ce qu'elle venait de dire. Lui fît mine de tremper son pinceau dans la peinture pour se remettre à travailler tandis qu'elle lui présentait des excuses. Il essaya de ne pas tiquer que le "mal fini" mais il voyait très bien ce qu'elle voulait dire ... Cependant contrairement à elle, il n'oubliait pas la présence d'une autre Lutra dans la pièce qui n'apprécierait pas de tenir la chandelle.

"Carrément ouais ..."

Il tourna la tête, gêné, et sans crier gare, jeta un peu de peinture rouge sur Jeanne avant de se remettre à peindre, l'autre côté du décor cette fois. C'était inutile, vu qu'on ne le verrait que des coulisses ! Mais c'était un prétexte pour rester encore un peu.
Il jeta un coup d'oeil à Alix et se glissa derrière de manière à se retrouver près de Jeanne, tout en étant séparé par le décor. Etant relativement grand, sa tête dépassait légèrement.

"Tu fais quoi après ?"

Peut-être qu'Alix aurait répondu avant Jeanne.

"Pas toi, nounouille" lui dit-il. "Toi t'as Quidditch ..."

Il jeta un coup d'oeil à Jeanne par un jour dans le décor, bien content qu'elle ne le voit pas parce qu'il était aussi rouge que son pot de peinture.

L'air encore une fois détaché de Lysandre désespérait Jeanne. Elle ne s'attendait pas du tout à ce qu'il soit un modèle conforme d'un prince charmant qu'on trouve dans les contes, mais quand même ! Il était véritablement incroyable. En fait, Jeanne ne savait plus sur quel pied danser. Non seulement il lui avait ENCORE mit de la peinture sur le visage (ça devenait une manie !) mais en plus il migra de l'autre côté du décor. Jeanne se tourna alors vers Alix qui était toujours à côté d'elle, et lui lança un regard interrogateur, mimant avec ses lèvres en levant les épaules "qu'est-ce que j'ai dit ?!"

Lorsqu'il lui demanda alors ce qu'elle faisait ensuite, Jeanne tourna rapidement le visage vers le décor parlant. Elle avait été prise un peu au dépourvu. Elle ne savait pas réellement quoi répondre. Mais soudain, son cerveau semblait avoir retrouvé sa place et avait lancé l'alerte rouge. Elle se sentait idiote de s'être excusée d'être partie, visiblement il s'en fichait royalement. D'un ton désormais assez sec qui trahissait sa nervosité, elle répondit.

Je travaille. J'ai un exposé pour Fillarius à faire. Merci à tous les deux d'être venus me prêter main forte, c'était absolument adorable. Je... Il faut que j'y aille.

Elle ramassa son sac et n'osa même pas se tourner vers Alix. Pourtant, cette fois, elle n'aurait pas l'occasion de se débiner.

Il était vrai que le travail d'Alix sur le décor n'était pas très beau à voir, la pauvre n'ayant aucun talent artistique, et l'on devrait probablement repasser par-dessus. Mais bon, hein ! S'ils n'étaient pas contents, il avaient qu'à être un peu plus dégourdis et se débrouiller pour flirter sans l'aide d'une amie !

Heureusement, l'humeur était au beau fixe, et tous trois riaient gaiement des plaisanteries de la Lutra. Sa tentative de détendre l'atmosphère entre les deux coincés du popotins fonctionna si bien que Jeanne se lança dans des excuses gênées concernant son comportement de quelques jours auparavant. Alix lui aurait bien donné une grande tape de félicitation dans le dos, mais à la place elle se fit la plus possible pour se faire oublier et ne pas briser l'élan de la Cerva.
En revanche, en ce qui concernait Lyly, c'était plutôt une bonne claque dans la tronche qu'elle avait envie de lui donner. Croisant son regard alors qu'il s'échappait derrière le décor, elle lui fit les gros yeux signifiant qu'il venait de louper une occasion en or. Jeanne chercha une réponse en silence auprès d'elle, mais Alix ne put que hausser les épaules d'un air las : ce n'était pas la faute de la petite faunette si elle était amoureuse d'une chiffe molle.

Toutefois, le Lutra surprit sa pendante féminine en tentant quelque chose et en demandant à Jeanne ce qu'elle faisait après ; pour le courage de demander en face, on repasserait, mais c'était un début.

- J'ai rien dit !, grommela Alix alors qu'il la traitait de nounouille, essayant de ne pas trop râler car elle savait que c'était la façon de Lysandre d'évacuer l'anxiété qu'avait du générer cette tentative.

Cependant, les deux autres commençaient à sérieusement lui courir sur les nerfs avec leur jeu du chat et de la souris...et à lui infliger ce manège, en plus ! Cela finissait par l'agacer, et il y avait un moment où elle arriverait au bout de sa patience...

- Je travaille. J'ai un exposé pour Fillarius à faire. Merci à tous les deux d'être venus me prêter main forte, c'était absolument adorable. Je... Il faut que j'y aille.

Et ce moment venait d'arriver. C'en était trop, l'indulgente conseillère conjugale capitulait.
Alix se jeta sur Jeanne en l'attrapant par les jambes, ce qui eut le bénéfice de l'empêcher de partir...en la faisant s'écraser contre le décor fraîchement peint. La tête de Lysandre traversa par un buisson en trouant le carton, le jeune homme n'ayant pas vu venir le drame étant donné qu'il se cachait.

- RAH ! C'est bon là, vous m'avez SAOULÉE avec vos conneries ! s'exclama la Lutra en se relevant et en balançant son pinceau par terre.

Elle asséna un coup de poing sur le haut du crâne de son meilleur ami et tira sa faunette préférée d'un coup sec par le bras pour la relever, ne leur laissant absolument pas le temps de protester.

- Alors maintenant toi tu lui avoues que tu es raide dingue d'elle depuis un an, et toi t'assumes le fait que tu meurs d'envie de l'embrasser à nouveau. ET VOUS ARRÊTEZ DE ME FAIRE CHIER !

La jeune sorcière jeta un dernier regard chargé de menaces à ses deux amis - signifiant clairement *si je ne vous vois pas main dans la main ce soir, je vous étripe à la petite cuillère !* - et elle sortit du théâtre d'un pas exaspéré.
Heureusement qu'elle avait Quidditch, en effet, car il fallait qu'elle se défoule sur des cognards plutôt que sur ces deux gamins !

Si elle avait un travail pour le Professeur Fillarius à faire alors Lysandre capitulait. Il trempa tristement son pinceau dans la peinture tandis que la Cerva déclinait sa proposition. Là, c’était le râteau ultime ! Dépité, il commença à barbouiller quand le décor s’écrasa sur lui. Jeanne était à terre, et Alix leur hurlait dessus à tous les deux avant de partir. Lysandre avait eu l’impression de prendre une douche glacée, de se savonner avec des glaçons et de devoir traverser tout nu une grande étendue de neige pour aller chercher une serviette mouillée pour se sécher. D’ailleurs, ça lui aurait sans doute fait du bien.

Furieuse à juste titre, Alix quitta la salle à grands pas. Lysandre, qui était à nouveau couvert de peinture alla près de Jeanne et s’accroupit devant elle en repoussant ses beaux cheveux blonds. Un peu confus, il réussit quand même à s’arracher un sourire.

« Ca va Pep’s ? Elle t’a pas fait mal ? Cette espèce de brute. »

Il lui prit la main pour la relever tout en la regardant dans les yeux et entreprit de retirer les bouts de carton qu’elle avait dans les cheveux. Il avait envie de l’embrasser et elle aussi. Il l’avait fait des dizaines de fois, sur une scène, devant toute l’école. Et même qu’Agathe n’était pas si jolie que ça. Enfin, tout le monde la trouvait très belle mais lui, il préférait mille fois embrasser Jeanne. Alors pourquoi avait-il autant d’appréhension ? S’obligeant à congédier son cerveau ou ce qu’il en restait, il se pencha vers elle et déposa sur ses lèvres un baiser digne de figurer dans la scène finale du spectacle de fin d’année. Ce n’était pas Merlin qui le donnait à Jeanne, c’était Lysandre. Il laissa leurs lèvres se séparer pendant quelques secondes et se risqua à ouvrir les yeux parce qu’il s’inquiétait pour elle, mais aussitôt il les reprit en serrant la petite Cerva dans ses bras.

Jeanne avait été plaquée au sol... Littéralement. Ou plutôt, dans le décor. Sa robe, déjà multicolore, se retrouva colorée d'avantages, recouverte de peinture fraîche.

Contrairement à Lysandre, Jeanne avait l'impression d'avoir été jetée dans une poêle brûlante. Se joues, son nez, son front, son crâne même étaient rouge écarlate. Elle regardait Alix bouche bée, les yeux écarquillés. Non mais elle lui avait juré de ne rien dire !!!! Quoi comment ça "dingue d'elle depuis un an" ???

Lorsque la tornade verte (et bleue désormais) quitta le théâtre, Lysandre accourra vers Jeanne, lui demandant si Alix lui avait fait mal. En état de choc, elle fit simplement non de la tête. Le LUTRA la regarda alors dans les yeux et, alors qu'il l'aida à se relever, il l'embrassa. Mais ce n'était pas un baiser comme la dernière fois. Il n'y avait plus aucune ambigüité. Lysandre ne jouait pas à cet instant, il n'y avait aucun doute là dessus, même pour Jeanne qui cherchait perpétuellement la complexité. Non, cette fois, il l'embrassait réellement et sincèrement. Alors qu'il décollait ses lèvres des siennes, elle entre-ouvrit les yeux et croisa le regard de Lysandre pendant quelques secondes. Elle esquissa un sourire avant qu'il ne l'embrasse à nouveau, la serrant contre lui. Jeanne passa alors ses bras autour de la nuque de Lysandre (oui parce qu'elle n'est pas SI PETITE que ça...) et lui rendit son baiser au centuple. C'était comme si plus rien ne comptait autour d'eux, comme si plus rien n'existait, comme si plus rien n'avait d'importance. Lorsqu'enfin leurs lèvres se décollèrent, la réalité reprit sa place et Jeanne se recula brûtalement. Non, pas à cause de Lysandre mais...

OHNON !!!! LE DÉCOR !!!

Jeanne se retourna vers le carnage qui avait été fait par Alix. Jeanne soupira et sorti sa baguette.

Bon... C'est pas grave... Reparo...

Magiquement, tout reprit sa place. Chaque petit bout de carton retourna à sa place, tout redevint comme avant. Jeanne se tourna alors vers Lysandre et esquissa un sourire. Elle passa sa main sur sa joue, enlevant une petite tâche de peinture. Elle le regardait dans les yeux tout en souriant.

Tu es encore recouvert de peinture...

S'approchant doucement du visage du jeune homme, elle déposa sur ses lèvres un tendre baiser avant de prendre sa main dans la sienne, entrelaçant leurs doigts ensemble. Elle recula alors ses lèvres et l'entraîna avec elle, s’asseyant au bord de la scène à ses côtés. Elle lui devait des excuses... Pour tout...

Alors comme ça tu es "dingue de moi depuis un an", hein...? C'était pour ça que tu m'appelais toujours "princesse"? C'est pour ça que tu te comportais comme ça avec moi...?

Jeanne baissa la tête, elle se sentait idiote. En fait, depuis le spectacle de fin d'année de l'année passée, Jeanne s'était rendue compte qu'il y avait en Lysandre quelque chose qui l'attirait inévitablement. Elle se souvient l'avoir vu joué alors qu'elle était dans les coulisses... Sans doutes était-ce la lumière, son personnage, son texte... Toujours est-il que tout était réuni pour qu'elle tombe amoureuse de lui. Jeanne releva alors la tête, regardant Lysandre dans les yeux.

Tu sais... En fait, depuis la pièce de l'année dernière... Tu me plais aussi et je... Je croyais que tu l'avais compris et... Et que tu te moquais de moi... Je suis vraiment désolée si j'ai pu te blesser ou...

La petite Cerva s'écarta brusquement du Lutra et s'exclama devant ce qui restait de son décor. Lysandre regarda vers le sol, confus. C'était un peu de sa faute s'ils en étaient là. Il voulu prendre sa baguette mais il n'eut pas le temps de prononcer la moindre formule magique que déjà Jeanne avait tout réparé. Il lui sourit et lui prit la main tandis qu'ils allaient s'assoir. L'adolescent devinait qu'ils allaient certainement se parler à coeur ouvert maintenant, et même lui comprenait que ce n'était pas le moment de faire le con. Il garda la main de Jeanne dans la sienne tandis qu'elle lui posait les questions qui lui passaient par la tête.

Pour Lysandre qui était constamment en représentation et qui avait l'habitude de passer pour le trublion de service, l'exercice n'était pas simple. Mais son attitude induisait parfois les autres en erreur, souvent, comme venait de lui démontrer Jeanne.

"Ben ... en fait ... je sais pas, enfin peut-être ... tu me plais beaucoup depuis la première année mais depuis l'année dernière ... euh ... à vrai dire je pensais que moi non plus je pouvais avoir une chance avec toi alors ... Tu sais, je suis plutôt maladroit et c'est la première fois que je ressens ça pour quelqu'un."

Il lui fît un petit sourire contrit et passa ses mains dans ses cheveux bouclés en souriant. Ce qui l'avait séduit chez Jeanne, c'était surtout sa personnalité pétillante, toutes ces capacités artistiques, le fait qu'elle soit une fille très différente des autres.

"Alors du coup ... tu veux bien sortir avec moi ?" lui demanda t'il pleins d'espoir.

Jeanne écouta Lysandre et se senti rougir. Jeanne était toujours passée pour la bonne copine un peu fofolle, celle qui souriait tout le temps mais avec qui personne n'imaginait sortir, en réalité. Alors avec qui d'autre que Lysandre pouvait-elle être ? Personne, car ils se ressemblaient beaucoup, en réalité. Et ce couple était loin d'être improbable.

Lorsqu'il lui demanda si elle voulait sortir avec lui, elle se mit à rire doucement. Le regardant dans les yeux, un large sourire aux lèvres, elle lui répondit avec une certaine évidence.

Oui, Lysandre Sainclair... Bien entendu que je veux bien sortir avec toi !

Elle s'approcha alors du jeune Lutra et l'embrassa tendrement, comme un point final à cette page mêlée de quiproquos, de doute, de peur et de confusion totale. Ils commençaient désormais la page de leur amour et ce serait sûrement la plus belle.

Après quelques instants, elle décolla ses lèvres de celle de Lysandre et posa son front contre le sien, tout en souriant. Elle avait fermé les yeux et elle se mit alors à rire doucement.

La tête que va faire Alix... Elle avait l'air vraiment fâchée en partant... Tu crois qu'elle nous en veut encore...?

Lysandre se laissa embrasser par Jeanne et passa ses doigts dans ses boucles blondes. Il sourit bêtement quand elle accepta de sortir avec lui, passa un bras par dessus ses épaules et la serra contre lui. Tout fluffy, le Lutra était à peine paniqué en imaginant la colère d'Alix à son égard ... il l'était beaucoup plus à l'idée de lui devoir des milliers de sachets de bonbons et songeait qu'il devrait faire un emprunt sur plusieurs générations pour s'acquitter de sa dette.

Avec Alix, on arrive pas à rester fâché. dit-il confiant.

Même si parfois, ils s'étaient boudé pendant quelques jours cela avait toujours fini par devenir un jeu, à qui craquerait et parlerait à l'autre en premier. Cette période la était d'ailleurs souvent plus longue que la dispute en elle même car les deux Lutra étaient tous les deux très têtus.

T'inquiète pas ! Bon ... on devrait peut-être partir d'ici ... On est pas vraiment censé se trouver là si on a pas de travail.

Il sauta de l'estrade sur le sol et tendit les bras vers la Cerva.

Allez Princesse, saute je te rattrape !

Jeanne souriait bêtement elle aussi, calée dans les bras de Lysandre. Elle se sentait parfaitement bien et tout était parfait à cet instant. Elle oublia rapidement la colère d'Alix qui serait sûrement ravie de savoir qu'ils s'étaient enfin décoincés. La petite faunette était rassurée par les paroles de Lysandre, après tout il connaissait presque encore mieux qu'elle Alix.

Oui, tu as raison... Vu l'heure, si on allait manger ? Je meurs de faim !!!

En fait, depuis le matin, elle avait été incapable de manger quoi que ce soit. Elle était maintenant affamée et, un large sourire aux lèvres, elle se laissa glisser de l'estrade vers les bras de Lysandre. Elle atterrit dans ses bras et, s'approchant lentement de lui, elle déposa sur ses lèvres un tendre baiser plein d'amour. Elle attrapa alors la main du jeune homme et entrelaça ses doigts avec les siens et ils quittèrent le théâtre.

Bon !! A taaaaaaable !!!!

Enfin ils étaient ensemble, enfin ils pouvaient se dire leurs sentiments sans se demander ce que ressentait l'autre, enfin elle pouvait penser à elle et à lui sans craindre la réaction du jeune homme. Cet instant était tout simplement parfait.