C’était un homme plutôt maussade qui pénétrait dans la librairie de Brocéliande ce jour-là. Goulven avait perdu son sourire. L’affaire de Lucila avait pris une tournure qui était loin de le satisfaire et l’avocat n’était pas fier de lui en ce moment précis. Et puis, il y avait ces bruits de couloir, sur la capture imminente de Jared Faure, le chef des rebelles et accessoirement son ami. Il avait de plus en plus de mal à travailler en toute sérénité et avait conscience qu’il n’avait jamais été aussi près de la porte de sortie … A vrai dire il ne lui fallait pas grand-chose pour qu’il n’y croit plus et qu’il n’en ait rien à faire. Mais que serait-il s’il n’était pas avocat ? Il n’en avait aucune idée, il n’envisageait pas d’autre carrière alors c’est sans doute pour ça qu’il s’y accrochait de manière quasi désespérée.

Après cette mésaventure, il décida d’aller se retrancher dans la librairie de Brocéliande où il se rendait parfois après le travail. Le fait de se trouver au milieu des livres l’apaisait. Et lui faisait penser à Irmine. Tais-toi, cerveau. Comme certains Moldus regarderaient de la TV réalité, Goulven pour se détendre lisait des romans qui n’étaient pas très mobilisant intellectuellement parlant et fort heureusement ce jour-là, il mit la main sur le dernier autorisé d’Elyon Sombrelune, le dernier exemplaire en plus, ce qui fît qu’il ne réfléchit pas beaucoup avant de s’en emparer, par contre il vérifia d’un coup de tête qu’il n’était pas vu par une connaissance parce que voyez-vous : il n’assumait pas du tout le fait d’aimer ce genre de littérature. C’était comme s’il se mettait à Jane Austen, sa virilité en prenait un coup ! Cachant le titre contre sa veste, il s’autorisa à flâner encore un peu dans les rayons pour voir ce qu’il pourrait trouver d’autre mais à vrai dire il avait du mal à se changer les idées.

Pour la première depuis le début de l’histoire de l’humanité, un élève avait posé une colle à notre intrépide Jenna. Autant dire qu’elle était carrément en rogne de s’être fait clouer le bec par un mioche pré-pubaire à la voix défaillante. Heureusement pour elle, il s’agissait d’une vraie question à laquelle il s’attendait à recevoir la science infuse de son professeur. Du coup, Jenna s’était débrouillée pour ne pas passer pour une toquarde et avait fait une démonstration d’acrobaties intellectuelles pour faire croire à l’autre gnome des cavernes qu’ELLE savait. Ce qui était complètement faux, ne l’oublions pas.

Et maintenant la voilà à crapahuter dans les ruelles de Brocéliande à la recherche d’une librairie digne de ce nom pour pourrait l’aider à combler son ignorance. Comme si elle n’avait rien de mieux à faire un jour de relâche ! Comme quoi quand on dit que la fierté ça peut tuer un homme. Bon, ici, il s’agissait surtout de lui voler du temps. Mais merde il lui avait posé une colle ce satané bougre d’andouille !

Ruminant son agacement, Jenna arpentait maintenant les allées de la première librairie qu’elle avait trouvé, cherchant sans grande conviction un foutu bouquin de sortilèges sur les objets. Elle aurait mieux fait d’aller voir Irmine et lui demander son aide mais non…. Fierté, égaux et tout le tralalala ! Purée de purée ! A la prochaine interro, il allait morfler ce p’tit cafard, foi de Tillier… Quoi c’était pas du tout professionnel ? Et alors…

Jenna se stoppa net dans ses sombres réflexions en voyant passer un exemplaire littéraire écrit par sa cousine chérie. Tiens ! Bah alors, ils en vendent encore ? C’est Elyon qui va être contente de l’apprendre ça… Relevant le nez pour surprendre l’individu intéressé par cet ouvrage, la jeune femme ne put s’empêcher de sursauter en découvrant qu’il s’agissait d’un mec. Après tout, pourquoi pas hein…

«  Ce livre est GE-NIAL ! Vous allez pas être déçu… »

Oui, bon, pour les bonnes manières on repassera, comme d’habitude. Debout à côté de lui entre les rayonnages, Jenna fixait le potentiel fan d’Elyon avec un sourire satisfait. Elle aurait pu parler pendant des heures des livres de sa cousine, étant souvent bien incapable de se retenir de raconter l’histoire avant que ses interlocuteurs ne puissent mettre le nez dedans. C’est d’ailleurs sans doute ce qu’elle était sur le point de faire mais quelque chose la dérangeait.

« C’est fou ! Votre tête me dit quelque chose… On s’est déjà croisé non ? Rah ! J’arrive pas à me remettre votre tête… »

Et hop, dix points de plus pour le manque de finesse. Plissant les yeux dans une tentative pour identifier son interlocuteur, du moins celui qu’elle avait forcé à devenir, elle eut soudain une illumination.

« Et mais… Attendez une minute ! Vous étiez à mon procès ! Si, si je vous remets maintenant… Vous étiez juriste ce jour-là... »

Suspectant qu’il était là pour retirer le dernier exemplaire en vente d’Elyon, Jenna lui arracha des mains et le serra fortement contre sa poitrine en continuant de le fixer, suspicieuse. S’il était là pour causer du tort à sa cousine, il allait avoir à faire à elle, ça il pouvait y compter. Nafoutre qu’il soit juriste, membre du gouvernement ou même de la milice.

« Qu’est-ce que vous comptiez faire avec ce livre ? Espèce de fasciste ! Je vais pas vous laissez faire. Elle a des droits comme n’importe quel sorcier ici ! Et si vous venez me sortir qu’elle est différente parce qu’elle est hybride, je vous préviens, je vous colle mon pied au cul que ça vous clouera les chicots dans votre cervelle étriquée ! »

Et bien voilà ! Jenna avait gagné sa journée ! A savoir, se prendre le chou avec un membre de l’autorité…

Sans aucune autre forme de procès il fût abordé par une jolie rousse qui lui assura que le livre qu'il avait dans les mains était génial. L'avocat lui sourit.

"Ah ? Et bien ce sera ma cousine qui sera ravie de le lire ..." mentit-il.

"C'est pour faire un cadeau ..."

Goulven n'assumait vraiment pas de lire ce genre de livres et conduisait son mensonge d'une manière éhontée avec un aplomb incroyable, mais ce n'était rien à côté des plaidoiries qu'il devait parfois débiter lors des audiences.

La jeune femme pensait l'avoir croisée, Goulven qui était quelqu'un qui avait une bonne mémoire des visages savait très bien où mais il n'était pas certain qu'elle aie envie de se rappeler de ce moment. Elle n'eut cependant pas besoin de son aide pour remettre sa tête et à ce moment-là son attitude changea du tout au tout. Il écarta le livre pour le tenir hors de portée de la jeune fille et la regarda avec des yeux ronds.

"Fasciste ? Moi ? Mais ça ne va pas non ? Je suis incapable de faire du mal à un livre, même s'il a été écrit par un Troll ! Qu'est-ce que vous voulez que j'en fasse ? Le lire bien-sûr !"

Il devint blanc comme un linge.

"Une fois que ma cousine l'aura fini, si j'ai le temps, hein, enfin bref ! Oh, zut !"

Passant du blanc au rouge, il le serra contre lui et regarda la jeune femme d'un air de défi.

"Et puis baissez d'un ton, on est dans une librairie, en plus à dire des trucs pareil, vous pourriez avoir des gros problèmes."

Elle, enfin, lui plutôt. Il se rapprocha d'elle et lui dit sur le ton de la confidence - quand il fût sûr qu'elle se soit calmée.

"J'en ai rien à faire que Sombrelune soit hybride, si vous pensez que je le prends pour en faire un autodafé, c'est bien mal me connaître. Soyez plus discrète si vous voulez éviter les geôles ..."

La bouche grande ouverte et les yeux écarquillés, Jenna fixait son interlocuteur profondément choquée de s’être fait arracher le livre d’Elyon des mains. Non mais comment il avait osé celui-là ! Il se prenait pour qui ? Le Consul sorcier… Non mais alors là c’était le pompon sur la cerise du bouquet… Il perdait rien pour attendre. Elle faillit s’étouffer en l’entendant parler de Troll qui pourrait être l’auteur du livre. Mais comment il osait dire des choses pareilles, de sa cousine en plus… Elle n’entendait plus du tout ce qu’il essayait de lui expliquer, se fichant pas mal de cette histoire de cousine qui était destinée à recevoir le livre.

« Comment ça écrit par un troll… Non mais ça va aller les noms d’oiseaux… Est-ce que je vous traite de Scrout à Pétard moi… Non ? Alors un peu de respect pour l’auteur bordel de… »

Jenna ne termina pas sa phrase car le jeune homme lui faisait remarquer qu’ils étaient dans une librairie et que le silence, ou du moins la discrétion, était de rigueur. Pinçant les lèvres pour fermer sa bouche, la jeune femme continuait de fulminer, mais intérieurement cette fois. Elle avait fortement envie de lui envoyer son poing dans les côtes ou de lui mettre un coup de tête, au choix. Mais elle savait pour l’avoir déjà pratiqué sur ses frères, qu’elle subirait la douleur plus que lui. Maudite force de mouche !

Elle sursauta en le voyant approcher son visage du sien et eut un vif mouvement de recul. Non mais quoi maintenant ? Il allait se calmer lui. Sinon elle allait vraiment lui en mettre une ! Elle l’écouta malgré tout parler et ce qu’il lui dit ne l’aida pas du tout à rester zen.

« C’est une menace ? »

Qu’il se montre aussi irrespectueux envers sa cousine était une chose déjà difficile à entendre mais en plus qu’il l’oblige à se taire sous peine de l’envoyer dans les geôles fallait pas pousser mémé. Jusqu’à preuve du contraire, ce p’tit mec insupportable n’était que juriste. Si elle avait envie de dire qu’Ely était comme tout le monde, elle n’allait pas se priver de le faire namého…

« Je dis ce que je veux, où je veux et à qui je veux ! Non mais… Y a pas de lois qui m’interdisent de m’exprimer librement dans ce pays ! Ni qui enferment les gens parce qu’ils affirment que les hybrides sont des sorciers comme les autres ! Vous êtes un putain d’raciste en fait ! C’est VOUS qu’on devrait enfermer… Espèce de fou furieux ! »

La main dans la poche de sa veste, Jenna était prête à en découdre avec l’individu en face d’elle. Les sortilèges c’était plutôt son fort. Bon ce n’était sans doute pas la plus brillante idée de sa vie que de s’en prendre à un membre de la justice magique de son pays mais les idées brillantes elle les laissait à Aaron.

Elle plaisantait ou bien ? Il ne lui serait pas venu à l'idée de traiter quelqu'un de Troll. Il regarda la jeune rousse avec des yeux ronds comme des billes. Une menace ? Il voulu rétorquer mais elle ne lui en laissa pas le temps, elle enfonçait la main dans sa poche probablement en quête de sa baguette, lui fît la même chose. Elle n'allait tout de même pas le défier en duel là, comme ça non ?

"Mais vous êtes une grande MALADE ?!"

Comprenant que tout ce qu'il dirait serait retenu contre lui, il devait bien choisir ses mots pour ne pas déclencher la fureur de la jeune sorcière. Les lois dont parlait la jeune fille n'avaient pas encore été promulguées mais cela ne saurait tarder.

"J'étais JUSTE venu m'acheter des livres moi ..."

Il s'éloigna de quelques pas en regardant la sorcière d'un air méfiant, elle serait capable de lui envoyer un sortilège dans les fesses que cela ne l'étonnerait pas.

"Je ne vais pas me battre avec vous, dans cette librairie, c'est hors de question !"

Déjà, ça ne se faisait pas et en plus il n'était plus trop certain de ses capacités en duel. En plus cela serait un motif d'arrestation et il n'avait aucune envie d'expliquer qu'une espèce de folle furieuse l'avait agressé.

"Je l'achète pour le lire, je les ai tous, je suis un grand fan d'Elyon Sombrelune. Ca vous va ?" dit-il complètement humilié. "J'peux y aller maintenant ?"

Jenna fit mine d’être outrée lorsqu’il l’insulta de folle furieuse, ne se privant pas d’agrémenter chaque phrase de son interlocuteur par des interjections bruyantes ponctuées par une bouche grande ouverte d’effroi. Remarquez, elle l’avait un peu cherché aussi et ne s’attendait pas vraiment à ce qu’il lui tourne le dos et sorte la queue entre les jambes. Non ça, ça n’arrivait qu’avec les élèves en règle générale…

Le front marqué par la colère, Jenna ne laissa pas l’individu qui lui faisait face prendre de distance, avançant dans sa direction tandis qu’il reculait. Sa dernière déclaration lui fit l’effet d’une bombe et elle se figea sur place lorsqu’il lui hurla qu’il était un grand fan des œuvres de sa cousine. Alors là… Elle ne l’avait pas vu venir ! Figée dans l’allée de la librairie, la jeune femme le dévisagea la bouche grande ouverte avant de froncer les sourcils en penchant la tête sur le côté. Qu’est-ce que c’était que ce gus ! Un homo ? Non pas qu’elle ait des soucis avec son choix de partenaire, ça ne regardait que lui après tout. Mais bon… Ah ça c’est sûr, elle ne s’y attendait pas du tout. Son doigt pointé sur lui, elle ouvrit la bouche pour dire quelque chose mais finit par la refermer en pinçant les lèvres, perplexe. Ouah ! Bah ça !

« Sérieusement ? » finit-elle par lâcher dans un souffle.

Tous les muscles de son corps se relâchèrent soudainement et sa rage s’envola aussi vite qu’elle était venue. Un peu gênée par l’attitude qu’elle avait eue plus tôt, Jenna commença à gesticuler sur place, dodelinant d’une jambe à l’autre en se grattant la tempe.

« Bah ça alors… »

Elle se figea une nouvelle fois lorsqu’une pensée lui traversa l’esprit et se remit sur ses gardes, croisant les bras contre sa poitrine et levant le menton dans la direction de son interlocuteur.

« Et qui me dit que vous êtes pas en train de me tricoter un bobard pour filer en douce avec ce livre et le brûler dans votre bureau mh ? Si vous êtes un SIIIII grand fan de ma Lyly, prouvez-le ! Quel est le titre de son premier roman ? »

Goulven était rouge de honte. Non pas que les livres d'Elyon Sombrelune étaient mauvais, c'était surtout qu'il n'était pas vraiment le public visé ... Il aurai bien voulu garder ce passe-temps qui était la lecture de la littérature à l'eau de rose pour lui plutôt que de devoir le crier dans une librairie. Mais cela sauva ses fesses, parce que ça semblait convenir à l'autre folle-dingue, le temps de quelques minutes seulement parce qu'elle revenait à la charge.

"Non mais c'est pas vrai ?! Vous n'allez pas lâcher l'affaire non ? 'Les amants du crépuscule', voilà, satisfaite ?"

Et il pouvait bien lui dire quels prix elle avait reçu pour ce livre.

"J'en ai un exemplaire dédicacé à la maison."

Certes ... ce n'était pas son prénom qu'il y avait dedans parce qu'il avait eu beaucoup trop honte pour le donner à l'auteur ce jour-là, mais au moins il l'avait, il était chez lui dans sa bibliothèque de la honte, à côté de ceux de Jane Austen et du journal de Bridget Jones.

"J'vous en prie, laissez-moi partir parce que ça commence à devenir vraiment gênant ..."

Jenna dut se résoudre à mettre son ricanement victorieux au placard lorsque son interlocuteur répondit avec justesse à sa question. Ses bras jusqu’alors croisés contre sa poitrine tombèrent mollement le long de son corps tandis que sa bouche s’ouvrait si grand qu’elle aurait pu s’en décrocher la mâchoire. Il était rouge de honte mais ça, elle ne le voyait pas vraiment, tellement choquée de s’être fait clouer le bec alors qu’elle ne si attendait pas du tout. Non parce que bon, le mec devant elle faisait partie du ministère de la justice. Il avait sans doute beaucoup mieux à faire que lire de la littérature romantique. Attention, elle adorait la bibliographie de sa cousine mais cela restait de la littérature romantique et donc pas vraiment destinée à un public comme… Vous savez quoi ! Mais bon, après tout, tous les goûts étaient dans la nature comme on dit hein !

La bouche grande ouverte, Jenna tenta d’articuler des mots illustrant sa surprise, ses sourcils tellement relevés qu’ils auraient sans doute pu se confondre avec la base de sa crinière. Vraiment quel drôle de mec ! Et en plus il lui avoua avoir un exemplaire dédicacé de la première œuvre d’Elyon. Ah bah ça… Elle ne s’y attendait pas. Tentant de reprendre contenance, Jenna posa ses mains sur ses hanches, affichant un air qui se voulait sérieux mais qui devait certainement plus donner l’impression qu’elle était indisposée. Oui bah hein ! Ce mec lisait des romans d’amour quand même !

« Ouah ! Bah ça si je m’y attendais… »

C’est bon, avouez vous aussi que vous ne vous attentiez pas à ce qu’un membre du gouvernement sorcier, qui, ne l’oublions pas, tente par tous les moyens d’étouffer l’existence des hybrides, puisse de un lire un livre écrit par l’un d’eux et, de deux, apprécier de la littérature à l’eau de rose. Alors, oui, Jenna ne savait pas trop quoi dire là-dessus. Un silence gênant s’installa entre eux durant lequel la jeune femme ne put s’empêcher de le fixer comme une bête curieuse. Elle avait abandonné l’idée qu’il essayait de la baratiner pour se sauver avec le livre. Non parce que sérieusement, qui beuglerait son intérêt pour ce genre littéraire en public si ce n’était la stricte vérité ? Elle sursauta lorsqu’il exprima le souhait de s’éclipser après l’esclandre qu’elle avait provoqué.

« Attendez mais vous êtes sérieux ? A propos du livre ? Je veux dire… Vous êtes vraiment, vraiment sérieux ? Non parce que bon… Reconnaissez que vous êtes pas tout à fait le genre de public visé par les livres écrits par ma cousine alors… C’est un peu… Désopilant ! »

Une courte sonnerie étouffée retentit à l’intérieur de son sac, signal qu’elle venait de recevoir une alerte sur sa tablette. Levant la main devant elle pour inciter son interlocuteur à rester immobile un instant, elle fouilla dans sa besace pour sortir son gadget moldu.

« Vous ! Bougez pas deux minutes ! »

Allumant rapidement son appareil, Jenna fit glisser agilement son doigt sur l’écran pour passer d’une application à l’autre. Au bout d’un court instant, son visage s’illumina devant le message qu’elle avait sous les yeux et ne put retenir une exclamation de satisfaction. Elle n’avait plus besoin de perdre son temps ici, quelqu’un quelque part dans le monde avait trouvé la réponse qu’elle n’avait pas su donner à son élève ce matin même. Merci internet et merci aux sorciers moderne qui fréquentaient les forums !

« Héhéhé ! En plein dans sa mouille ! »

Redressant enfin la tête, elle croisa le regard perplexe de sa victime harcelée un peu plus tôt et perdit son sourire victorieux pour finir par se pincer les lèvres.

« On disait quoi déjà ? »

La gêne de Goulven était énorme. Avouer qu’il aimait la littérature à l’eau de rose, qu’il en lisait pour se détendre, il ne l’aurait jamais fait, même sous la torture.

« Attendez mais vous êtes sérieux ? A propos du livre ? Je veux dire… Vous êtes vraiment, vraiment sérieux ? Non parce que bon… Reconnaissez que vous êtes pas tout à fait le genre de public visé par les livres écrits par ma cousine alors… C’est un peu… Désopilant ! »

Il soupira très agacé et rougissant d'autant plus.

"Oui, bon, ça va hein ..."

Elle n'avait pas l'air décidé à le laisser partir et lui il n'osait pas de peur qu'elle ne lui inflige encore plus de honte qu'il n'en avait déjà subit. Il fût surpris en entendant un bruit que venait de son sac et la vit sortit un objet lumineux de la taille d'une boîte d'allumettes. Goulven avait déjà vu des Moldus utiliser ce genre de choses, mais il n'avait jamais eu l'occasion d'en voir de prêt ou d'en manipuler.

« On disait quoi déjà ? »

"C'est Moldu ? Un sonnar-phone c'est ça ?" dit-il au lieu de Smartphone.

Il se montrait vivement intéressé par tous les objets Moldus et s'il maîtrisait le sujet sur l'architecture et leur vie quotidienne dans les grande ligne, il avait déjà pris le bus et le tramway, il était même allé au cinéma mais en ce qui concernait leurs gadgets, c'était encore assez flou. Lorsqu'il était encore étudiant à Beauxbâtons et qu'il avait des cours d'Etude des Moldus, leur technologie n'était pas aussi avancée que maintenant.

Ce qui peut vous paraître tout à fait banal comme objet du quotidien ne l’est pas forcément lorsque vous êtes sorcier. Jenna avait bien souvent tendance à l’oublier et c’est avec une mine perplexe qu’elle fixa son interlocuteur lorsqu’il sembla s’intéresser à ce qu’elle venait de sortir de son sac. En vérité, elle n’avait pas compris de quoi il était en train de parler, n’ayant jamais entendu parler d’un sonar-phone avant aujourd’hui. Et pourquoi faire ? Passer un coup de téléphone aux baleines pour qu’elles nous chantent une berceuse ? Quelle drôle d’idée ! Enfin, elle ne mit pas trois plombes à comprendre lorsqu’elle le vit fixer le tout dernier modèle Samsung qu’elle serrait dans sa main.

« Oui… Enfin non ! C’est pas… Euh… A vrai dire on appelle ça un Smartphone mais oui, c’est moldu ! »

Jenna adorait se servir de la technologie moldue, la trouvant parfois beaucoup plus pratique que la magie. Les sorciers étaient parfois un tantinet vieux-jeux… Le seul problème c’est qu’elle ne pouvait pas s’en servir autant qu’elle l’aurait souhaité, les réseaux téléphoniques et le WIFI n’étant pas très répandus dans les zones exclusivement sorcière. Il faudrait qu’elle trouve un moyen d’y remédier d’ailleurs.

« En règle général, on s’en sert pour communiquer... Comme une cheminée portatif… Enfin non parce qu’on peut pas se téléporter d’un téléphone à l’autre… Ni faire du feu d’ailleurs… Par contre on peut s’en servir de torche… Enfin bref… Pourquoi je vous explique tout ça moi ! »

Pour Jenna, parler de technologie moldue à un autre sorcier revenait à expliquer comment transplaner à moldu, autrement dit c’était une tâche compliquée voire quasi-impossible. Mais là, elle ne pouvait pas se défiler en sortant simplement un « ta gueule, c’est magique ! ». L’individu en face d’elle semblait pourtant intéressé par mais il n’en restait pas moins un membre du gouvernement. D’ailleurs, il était présent le jour de son procès…

« Une minute… Vous allez pas encore m’arrêter et me confisquer mon téléphone ? J’ai juré que je ne recommencerai plus et d’ailleurs… Je n’ai installé aucune application illicite… Je le jure ! »

Bon c’était pas tout à fait vrai. Elle était quand même parvenue à bidouiller son appareil pour prendre des photos animées et avait créé My Talking Tom version sorcier où elle s’appliquait à élever un dragon numérique sur son temps libre ou durant les réunions interminables menées par le sous dirlo… Mais rien de véritablement illégal ou non gouvernemental. Elle avait retenu la leçon. Ou du moins, elle était beaucoup plus prudente… Avec la boisson !

Cachant son téléphone dans son dos pour le mettre hors de portée, Jenna fit quand même quelques pas en arrière en essayant d’évaluer ses chances de battre en retraite si jamais ce mec était une sorte d’agent du FBI sorcier prêt à lui sauter dessus pour l’immobiliser et l’emmener dans un cachot dissimulé sous terre avec aucune chance d’en sortir.

Les yeux rivés sur la chose, la curiosité du sorcier ne cessait de grandir tandis que la jeune femme lui donnait des explications sur le mystérieux objets carrés qui était apparemment capable de faire beaucoup de choses.

« En règle général, on s’en sert pour communiquer... Comme une cheminée portatif… Enfin non parce qu’on peut pas se téléporter d’un téléphone à l’autre… Ni faire du feu d’ailleurs… Par contre on peut s’en servir de torche… Enfin bref… Pourquoi je vous explique tout ça moi ! »

"Un genre de baguette magique ... Moldue ?"

Des milliers de questions lui venaient en tête. Le jeune homme aurait bien eu envie de les lui poser mais elle recommença cette espèce de crise de paranoia étrange qu'elle avait eu quelques minutes avant.

« Une minute… Vous allez pas encore m’arrêter et me confisquer mon téléphone ? J’ai juré que je ne recommencerai plus et d’ailleurs… Je n’ai installé aucune application illicite… Je le jure ! »

Blasé, il soupira et leva les yeux au ciel.

"Non, mais ... Je ne suis pas de la brigade ! Je m'intéresse c'est tout. Je suis avocat, mon travail c'est de défendre les gens, pas de les coller en taule ! Vous pouvez essayer de réfléchir de manière rationnelle 5 minutes ? Si je voulais faire disparaître ce livre, est-ce que je l'achèterais déjà ? Non, je le confisquerais. Vous croyez pas que si je voulais vous confisquer ce ... cet objet je l'aurais déjà fait depuis longtemps non ? Alors essayez de vous détendre un peu, je n'ai pas le pouvoir ni l'envie de vous arrêter."

Elle avait tout de même piqué sa curiosité et il avait tellement de questions à lui poser ! Ce n'était pas tous les jours qu'il croisait une sorcière qui avait sur elle de tels objets Moldus.

"Est-ce que je peux vous payer un verre ?"

Ohlàlà ! Il allait se calmer tout de suite déjà… De une, la première fois qu’elle avait vu sa tronche c’était à son procès et il était loin de défendre qui que ce soit à ce moment-là. Et contrairement à ce qu’il avait l’air de penser, elle n’avait pas suivi sa carrière depuis ce funeste jour ! Et de deux… Il délirait complètement si il s’imaginait deux minutes être capable de lui subtiliser son smartphone comme ça. Il savait pas à qui il avait faire. Une vraie ninja ! Pas moyen qu’il lui confisque quoi que ce soit juste parce que monsieur le grâaaaaand avocat en avait décidé ainsi. Namého ! Jenna n’était peut-être pas sportive pour deux sous et plutôt trouillarde mais si il y a bien une chose qu’elle avait appris en grandissant avec trois frères c’était comment les dissuader de l’emmerder. En somme, toujours viser les nounours !

A quelques pas devant lui, elle gardait toujours son téléphone bien serré au creux de sa main, planqué derrière son dos. Ses bras lui en tombèrent littéralement lorsque son interlocuteur lui proposa de lui offrir un verre.

« Pardon ? »

Elle allait encore jouer sa parano mais c’était quoi le piège maintenant. Non parce qu’à moins d’être maso, elle ne voyait pas bien pourquoi il voulait continuer de lui parler après leur petit échange hostile. Glissant son bien dans la poche arrière de son jeans, Jenna croisa finalement les bras contre sa poitrine, arborant une posture un peu trop défensive.

« J’ai bien entendu ? Non parce que bon… Vous venez quand même de sous-entendre que je suis débile ! Si c’est votre méthode d’approche en matière de drague, il faudrait voir à la remettre à jour. »

Jenna ne voyait pas trop pourquoi il voulait l’inviter à boire un verre comme ça, surtout après la façon dont ils s’étaient parlé tous les deux. Enfin la façon dont elle lui avait parlé tout au long de leur conversation pour être précise. Oui bah ça avait jamais gêné personne jusque-là que Jenna soit… caractérielle !

...

Que dire ?

La main de l'avocat s’abattit sur son front. La jeune femme avait l'air décidé à prendre de travers tout ce qu'il disait. Il regarda le livre qu'il avait dans les mains et le déposa dans les siennes non sans regrets.

"J'abandonne."

Plutôt se priver de lecture que de passer pour quelqu'un qui brûle les livres et encore pire, un dragueur ... Lui tout ce qu'il voulait, c'était discuter. Après lui avoir collé le livre dans les bras, il lui jeta un regard moitié affolé, moitié blasé et s'éloigna sans un mot. Selon lui, il était inutile d'insister, en plus elle ne semblait pas en reste de sortilèges à lui coller aux fesses si la situation tournait trop à son désavantage.

Mais il était tout de même déçu parce qu'il voyait qu'il ratait là une belle occasion de connaître cette nouvelle technologie Moldue. Néanmoins, il revint sur ses pas et lui lança.

"Et NON ce n'est pas une technique pour vous prendre par surprise !"

Et sur ces derniers mots, il disparut.